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Neelamok

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Création : 19/03/2018 à 19:20 Mise à jour : 04/04/2018 à 16:26

Blog de Neelamok



Cette histoire n'a pas de titre. Elle n'a pas de résumé non plus, d'ailleurs. Alors pourquoi ce blog ?

Bonne question. Pour voir, peut-être, si malgré le manque flagrant d'informations, certaines personnes s'aventureront à lire quand même. Me donnant par l'occasion la motivation nécessaire pour continuer à écrire. L'espoir fait vivre !

Plus sérieusement, je vais quand même donner quelques informations. C'est une histoire de fantasy. Elle va se dérouler dans un royaume, mais va s'étendre par la suite. Idéalement, si j'arrive à mener mon projet à bien, il n'y aura pas un personnage principal mais plusieurs, et ils ne parleront pas nécessairement la même langue. Disons que leurs langues viennent toutes de l'ancien français, et qu'elles vont toutes évoluer... librement. Mais le royaume dans lequel l'histoire débute parle le français moderne. Hm voilà. Pas de rating particulier, disons que c'est pour un public mature intellectuellement ?

Oh, et il y aura un forêt. Une grande forêt. Immense. Je le dis au cas où les couleurs de mon blog et les images choisies seraient trop subtiles. D'ailleurs, l'image de cet article vient de la forêt Huelgoat, l'autre de Brocéliande, toutes deux situées en Bretagne. Si jamais ça vous intéresse.

Quant à moi, je ne tiens pas particulièrement à me présenter. Ce n'est pas l'intérêt de ce blog. 

Sur ce... Bonne lecture !
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#Posté le lundi 19 mars 2018 19:51

Chapitre Un.

« Marcius ! »


Le forgeron s'égosillait à appeler son apprenti depuis plusieurs minutes déjà, l'impatience faisant gronder sa voix. Celui-ci arriva enfin, un air penaud sur le visage, et l'homme se radoucit en voyant la contrition sur le visage de Marcius.


« Tiens, dit-il d'une voix bourrue, tu dois apporter ça au duc, il compte l'offrir à son invité.


Marcius haussa un sourcil interrogateur.


– Son invité ! Le fils du roi ! Ne me dis pas que tu l'as oublié.


Le jeune homme grimaça. Non, il ne l'avait pas oublié. Il s'apprêta à répondre, mais fut interrompu avant même d'avoir commencé à parler.


– Non, ne dis rien. Tu ne l'aimes pas, je sais. Tu n'aimes aucun jeune du château, de toute manière. Contente-toi simplement de ne pas le croiser, lui et sa bande, et tout ira bien. D'accord ? Maintenant, file ! »


Marcius saisit l'épée empaquetée que le forgeron lui tendait et se mit en route sans plus attendre vers le château du duc. C'était un jeune homme métis séduisant avec ses yeux gris, aux cheveux étonnamment raides – héritage de sa mère. Son maître ne l'avait certainement pas choisi pour sa carrure, ni pour son habilité à manier le marteau, mais pour la passion dévorante qu'il vouait aux armes. Oh, il était musclé, c'était indéniable, suffisamment pour accomplir son travail. Simplement sa musculature était fine, comme si elle refusait de s'épanouir sous le regard des autres. De prime abord, rien ne le destinait à se diriger vers ce corps de métier, et il avait essuyé de nombreuses moqueries à ce propos ; pourtant le travail qu'il accomplissait était précis et ses productions toujours d'excellentes qualités. C'est qu'il mettait toute son âme dans son métier. Mais quand Rodric le voyait comme ça, parfaitement en dehors de la réalité, il se demandait s'il avait vraiment fait le bon choix. Ce gamin avait-il seulement une place quelque part ? Le forgeron soupira en suivant des yeux son apprenti qui s'éloignait. Forcément, celui-ci n'avait pas daigné mettre un vêtement décent. Résigné, le forgeron reprit son travail.



Le jeune homme refusait souvent de se changer avant d'aller au château, par pur orgueil, et il savourait d'avance la tête que tous ces nobliaux feraient en le voyant arriver couvert de crasse. Cette provocation dérisoire – mais ô combien satisfaisante ! – lui fit monter le sourire aux lèvres, et c'est avec assurance qu'il traversa le village en direction de la citadelle. La plupart des personnes qu'il croisa l'ignorèrent, certains se laissèrent même aller à quelques remarques désagréables, mais il ne s'en souciait guère. Depuis qu'il était sous la protection de Rodric, le forgeron, l'avis que les autres avaient de lui n'était plus si important. Peu importait que sa couleur de peau soit différente, que son père soit superstitieux, ou bien qu'il soit particulièrement vieux pour être un apprenti – à vingt-deux ans, les jeunes adultes avaient en principe déjà fini leur apprentissage, mais pas lui. Il avait trouvé sa place, et il finirait bien par se faire respecter un jour ou l'autre. Sa belle assurance s'envola bien vite lorsqu'il entra dans les jardins ducaux et vit qu'Ahri, la fille du duc, et son courtisan étaient là, entourés de leurs amis. Un frisson bien connu lui parcourut l'échine, et il baissa prestement la tête. La peur lui fit accélérer le pas en même temps qu'elle nourrissait sa colère contre lui-même ; il espérait ne pas être vu tout en s'en voulant terriblement de se sentir aussi lâche. Ses prières ne furent évidemment pas entendues et il entendit crier son prénom. Il voulut l'ignorer, continuer de marcher stoïquement afin d'accomplir sa mission comme le bon apprenti qu'il était, mais les cris s'intensifièrent, à son grand désespoir. Comprenant qu'il n'y réchapperait pas cette fois – ses tourmenteurs s'étaient levés et s'approchaient déjà de lui –, il fit volte-face et s'employa à afficher un air ennuyé, malgré la peur qui lui nouait les entrailles. Comme si son temps était plus important que le leur. Cette fausse assurance ne trompa personne, et surtout pas lui, qui ne désirait que fuir.
Le prince se dressa en face de lui et le regarda, faussement blessé.
« Serais-tu pressé par hasard ? Cela fait si longtemps que nous ne nous sommes pas vus...


– Ce n'est pas le moment. J'ai un paquet à remettre au Duc


– Marcius... Aurais-tu oublié comment l'on s'adresse à un prince ?


– Ne commence pas, gronda Marcius.
– Sinon quoi ? N'oublies pas ta place, l'étranger. N'oublies qui je suis, ni qui tu es. Et tu n'es rien. »


Marcius tressaillit. Peu importait le regard des autres, il avait trouvé sa place, grâce à Rodric. Mais quand il était face à Grégoire et ses comparses, sa récente confiance en lui s'envolait. Ne restait que le jeune homme humilié depuis des années, incapable de s'affirmer. Il maintint sa tête bien droite et choisit de se retourner, non sans serrer les poings. Les nobles riaient de sa fureur évidente, n'y voyant que la colère impuissante d'un enfant. Sauf Ahri. La future reine de Nusitie ne riait jamais bêtement aux méchancetés des autres, il semblait même à Marcius qu'elle l'aidait quelques fois, sous ses rires, en dirigeant la conversation ailleurs. Mais aujourd'hui, il ne recevrait aucune aide, il le voyait. Elle avait cette flamme, dans ses yeux et ce sourire, à ses lèvres qui indiquaient à Marcius qu'elle prenait plaisir à toute cette histoire, bien qu'elle ne s'abaisserait jamais à le montrer aussi ostensiblement que ses compagnons. L'apprenti était résigné en lui-même, pourtant il ne put s'empêcher de tenter une sortie. Il fit un pas de côté, sans desserer les poings, ce qui n'échappa pas à l'attention de ses tourmenteurs.


« Eh Marcius ! T'es apprenti forgeron maintenant c'est ça ?


Celui qui venait de lui adresser la parole était un garçon un peu gros, à la face rougeaude, toujours collé aux basques du Prince. Ses lèvres grasses étaient étirées par le sourire impatient de celui qui sait sa victime sur le point de subir une nouvelle attaque.


– C'est ce qu'il affirme. Mais un forgeron doit utiliser sa musculature, et celle de notre jeune ami n'est guère développée. »


De nouveaux rires fusèrent, comme si cette blague n'avait pas déjà été prononcée une centaine de fois par ces mêmes personnes, et Marcius se sentit une fois de plus rougir. Il n'avait jamais eu la carrure d'un forgeron. Pourtant, sous sa chemise de lin étaient dissimulés des muscles durs comme l'acier, frémissant d'excitation. Il ignora les deux idiots qui se croyaient malins, et plongea ses yeux directement dans ceux de Grégoire, deuxième du nom, futur héritier du trône.


« Ne t'en fais pas pour ça. Avec ma musculature si faiblement développée, je suis tout de même capable de broyer ta trachée royale. »


Il s'en voulut aussitôt d'avoir répondu. La peur l'avait toujours poussé à provoquer au plus alors qu'elle réduisait au silence et à la paralysie tant d'autres, qu'il enviait du reste. Là où il aurait dû adopter une attitude soumise, il ne pouvait s'empêcher de provoquer, sachant pourtant parfaitement ce qui allait suivre. Sans surprise, la réponse de son bourreau fut un crochet dans le ventre. Un classique, celui-là. Marcius avait l'habitude, et ses muscles abdominaux encaissèrent le gros du choc, mais il se plia tout de même en deux, pour faire bonne mesure – enfin une leçon qu'il avait réussi à retenir ! D'autres coups fusèrent, que Marcius encaissait de plus en plus douloureusement, et le jeune homme ferma les yeux, s'imaginant transpercer le prince avec le cadeau qui lui était destiné. Cette vision fit apparaître un sourire qui brisa son masque de souffrance.


« Il y a quelque chose de drôle ? Non, laisse-moi deviner ; tu nous es si spirituellement supérieur que nos coups ne t'atteignent pas ? Quel dommage... J'aimerais bien savoir ce qui te fait sourire, comme ça. Allez, dis-nous ! Ne sois pas égoïste !


Grégoire parlait avec une voix teintée de moquerie, mais une fureur frustrée transparaissait nettement sous ses paroles. Il détestait avoir le sentiment que le contrôle lui échappait – et voir Marcius sourire lorsqu'il le frappait équivalait indubitablement à une perte de contrôle.


– C'est que... tu te crois si puissant... alors que je pourrais t'étaler en un seul coup. »


Marcius cracha ses paroles et son sang à la face de ceux qui le terrifiaient, en affichant un air goguenard. C'était la seule victoire qu'il avait jamais eue sur eux ; leur faire croire que leurs coups ne l'atteignaient pas, qu'il était incassable, alors qu'il était brisé intérieurement depuis longtemps déjà. Mais sa satisfaction fut de courte durée, car le prince eut un sourire étrange, ce qui réveilla la peur de l'apprenti forgeron.


« Eh bien vas-y. Frappe-moi.


Le prince se pencha à l'oreille de Marcius et continua dans un murmure.


– Ose seulement. »


Le jeune homme savait qu'il n'y avait qu'une attitude envisageable. Baisser la tête, se rendre, se soumettre, et partir au plus vite. Se taire, surtout, arrêter la provocation. Mais alors le rire d'Ahri fit voler le silence en éclats. C'était un rire moqueur, impitoyable, et pourtant aussi doux qu'un rêve à l'oreille de ceux qui l'entendaient. Peut-être trouvait-elle cela cocasse d'imaginer un garçon si fin et si insignifiant frapper le prince, ou peut-être était-ce la perspective de voir ce même prince étendu à terre qui la réjouissait. Lorsqu'il se calma, il était déjà trop tard. Ce rire avait réveillé quelque chose en Marcius, réparé quelque chose qu'il avait cru irrémédiablement brisé – un semblant de fierté ? Alors qu'il s'apprêtait à rendre les armes, ce rire piqua son orgueil et raffermit sa volonté. Il ne voulait plus être un lâche, il ne supporterait plus ni coups ni moqueries. Cette époque-là était révolue.
Il eut un crispement de rage, ses muscles se contractèrent, et le coup partit sans même qu'il ne s'en rende compte. Comme dans un rêve, il vit son poing s'écraser sous la mâchoire de Grégoire ; il entendit le craquement sinistre que firent les os de son cou lorsque la tête de celui-ci partit sur le côté. Le prince s'écrasa violemment sur le sol, la stupeur peinte sur son visage.



***



Marcius arriva dans la cour d'Eliandre, duc d'Ailite, alors qu'il n'avait que sept ans. Son grand-père paternel venait de mourir – le seul aïeul qu'il eut l'occasion de connaître – et ses parents considèrerent cette mort comme le signal du départ, le moment de changer. Leurs bagages furent vite faits, et Marcius ne sut jamais ce qui poussa ses parents à partir au milieu des terres, eux qui avaient toujours vécu proches de la mer. Leur arrivée à Orme, la capitale d'Ailite et accessoirement la plus belle ville que Marcius ait jamais vue, avec ses couleurs vives et ses senteurs fleuries, provoqua l'émoi des habitants de manière durable. Leur peau sombre et leur vitalité débordante contrastait fortement avec les habitants à la peau plus pâle et qui, s'ils vivaient à l'extérieur et n'avaient rien de souffreteux, ne s'étaient jamais vus fortifier par l'air marin. Les premiers pas de Marcius dans cette nouvelle vie furent donc placés sous le signe de la méfiance et du rejet.



Il attendait près de l'âtre brûlant, grignotant ce que le cuisinier du château lui avait fait apporter. Cela faisait un mois qu'il était arrivé dans ce nouveau pays et il lui semblait découvrir de nouveaux mets chaque jour – ce qui, bien entendu, le ravissait. Son père avait fini par se faire remarquer par Eliandre lui-même, gonflant ainsi le c½ur de son jeune fils de fierté, et avait profité d'un entretien avec le duc pour montrer le château à son garçon. Ce dernier n'en avait du reste pas vu beaucoup, retenant que ce qui pouvait intéresser un esprit d'enfant ; les rampes de pierre où son corps glisserait sans difficulté, les portes de bois derrière lesquelles se dissimulait un fumet prometteur, la cheminée la plus grande de son existence où flambait un feu tout joyeux, et l'assiette remplie face à lui. Tout à la satisfaction impatiente de son ventre, il n'entendit pas les pas qui résonnèrent derrière lui. Il avait certes probablement entendu les sons, mais son cerveau avait classé cette information sans importance et l'avait résolumment tenue à l'écart de sa conscience. Il finit tout de même par se retourner quand une main se posa sur son épaule. Un jeune garçon se tenait face à lui, mais ce n'était pas un des enfants des serviteurs du château qu'il avait pu croiser. Celui-là portait des vêtements neufs à la coupe impeccable, d'une qualité bien supérieure aux tissus qu'il voyait habituellement passer entre les mains habiles de sa mère. C'était un enfant gâté, se dit aussitôt Marcius ; il le voyait au rictus satisfait qui semblait avoir déjà laissé une marque indélébile sur son visage poupon, et à sa manière de se tenir comme si tout lui était dû. Il avait la peau la plus blanche que Marcius ait jamais vue, et des boucles à la couleur chocolat lustrées impeccablement. Ses yeux noisette étincelaient, et il s'apprêtait à prendre la parole lorsqu'il réalisa qu'il n'avait pas l'attention de celui qui allait devenir son souffre-douleur. De fait, Marcius avait vite détourné son attention du noble qui lui semblait trop mesquin pour être intéressant, afin de la fixer entièrement sur la petite fille qui se tenait en retrait, un air rêveur peint sur le visage. Elle semblait être faite de porcelaine ; sa peau avait une teinte qui rappelait à Marcius celle du flan au caramel, un flan où auraient percé deux petites fraises à croquer en guise de lèvres. Et dans ses yeux, partiellement dissimulés par des cheveux d'un noir sauvage qui s'éparpillaient en ondulations profondes, semblait avoir fleuri tout un parterre de bourraches. Il était fasciné. Et son c½ur d'enfant se remplissait d'un amour innocent et admiratif, sans rien connaître de la personne qui habitait cette délicieuse apparence. Il fut brutalement arraché de sa torpeur par une voix enfantine qui tentait vainement d'atteindre les graves :


« Eh ! Tu m'écoutes ? Je suis le Prince Gregoire, deuxième du nom. Le futur roi de Nusitie. Et la fille que tu regardes avec tes yeux de chiots, c'est ma future femme, la fille du duc en personne. Alors je te conseille de ne pas trop t'attarder. »


Le jeune prince s'était rengorgé comme un coq en prononçant les mots ma future femme. Leurs fiançailles venaient d'être annoncées et il se sentait déjà comme un homme, rempli d'un trop-plein de virilité puérile qui le poussait à défendre l'honneur de sa nouvelle fiancée. Celle-ci haussa un sourcil moqueur en entendant Grégoire parler, tandis que ses joues prenaient une jolie teinte rosée. Elle allait prendre la parole, et Marcius espérait que c'était pour protester, mais Grégoire ne lui en laissa pas le temps. Il était frustré de voir que le nouveau venu ne se comportait pas de la même manière que les autres avec lui, et il sentait confusément que l'admiration de Marcius valait plus que bien d'autres, puisqu'elle serait sincère. Mais l'avis du gamin était déjà faite, et son admiration entièrement tournée vers Ahri. Aussi Grégoire repartit-il à la charge, sans se douter qu'il baissait encore plus dans l'estime de Marcius par ce simple acte.


« Et toi ? Qui es-tu ?


Marcius avait toujours été d'une timidité excessive. Pris de court, il se mit à bégayer.


– Je, euh... Rien. Enfin... »


Il allait se corriger, dire qu'il n'était pas rien, puisqu'il était de fait un être humain, mais les deux autres éclatèrent de rire avant, et le laissèrent patauger dans la confusion et le désarroi. De toute manière, tout ce qu'il aurait pu dire n'aurait pas été écouté, eusse-été la plus brillante tirade, le plus judicieux trait d'esprit de tous les temps. Son identité était faite ; et elle consistait précisément à une absence d'identité, une absence d'humanité même. Il n'était pas personne ; il était rien, un manque de réalité, un oubli dans le monde, un vide laissé là que nul ne voulait combler. Le rire n'était pas vraiment méchant, il était spontané. Mais Marcius en ressentit une honte terrible, et crut que dans ce rire se dissimulait un message ; celui qui disait qu'il n'était pas de leur monde, qu'il n'était rien pour eux.
Comme il aurait voulu avoir raison.
Son père le récupéra peu après, indifférent à l'image qu'il pouvait donner aux deux nobles. Il n'avait jamais été très respectueux de l'autorité, n'ayant jamais été habitué à obéir. Il venait des îles, pas de l'empire, ce qui apparaissait clairement par sa peau noire et, s'il vivait dans le royaume depuis vingt-cinq ans maintenant, il n'avait toujours pas pris la peine d'adapter son comportement à son environnement. Il ne se souciait que de sa femme, pour qui il était resté dans ce pays aux coutumes contraignantes, et de son fils, qu'il aurait préféré emmener loin. Il salua tout de même brièvement les enfants, et prit son fils par l'épaule pour le guider vers l'extérieur. Adieu, l'assiette pas encore vide, adieu la belle fille aux lèvres fruitées. C'est le c½ur déchiré que Marcius s'en alla, déçu de voir une si bonne nourriture lui échapper, et frustré de ne pas pouvoir prolonger sa contemplation. Mais le désir de savoir comment s'était déroulé le rendez-vous de son paternel prit le pas sur ses autres considérations, et dès qu'ils furent à l'extérieur il laissa s'échapper la question qui lui brûlait les lèvres.


« Alors ?


– Alors ? Je vais m'occuper des chiens et des faucons de chasse du Duc Eliandre. Je dois retrouver le maître des écuries demain, dès l'aube. 


– Même si on est des étrangers ? 


Rolloh, le père de Marcius, lui sourit affectueusement, légèrement attristé par la remarque de son fils. Il n'avait jamais tenu le c½ur des hommes en très haute estime, et sentait l'acide familier de la rancoeur lui remonter dans la gorge, en songeant que son fils avait déjà dû subir plus d'une réflexion désagréable concernant ses origines pour qu'il pose ainsi cette question.


– Oui, même si nous sommes des étrangers. Le maître des écuries est fatigué, sans être en âge de se retirer, et il a besoin d'un soutien dans sa charge. Son apprenti est doué avec les bêtes, mais est loin d'avoir mon expérience.
Marcius fit la moue. Son père ne répondait pas à la question posée. Celui-ci, observant la face boudeuse de son fils, esquissa un étrange sourire tordu. 


– Et puis, j'ai reçu d'excellentes recommandations. Eliandre aurait été fou de ne pas écouter l'avis du Duc Herbert. »


Le Duc Herbert était à la tête du duché d'Arligee. Ce duché avait beau n'être pas le plus populaire du royaume – ni même de l'Empire –, et son duc avait beau être un homme à la bonté débordante, qui passait plus de temps à satisfaire ses plaisantes qu'à s'impliquer dans les affaires de l'Empire, en ignorer conseils n'était jamais très avisé.



Marcius en fut extrêmement satisfait. Rassuré, il se mit à observer avec curiosité le décor qui l'entourait. Si le château d'Eliandre était imposant, ses jardins ne l'étaient pas moins. Ils s'étendaient à perte de vue, formant un soleil chatoyant autour de l'édifice. De nombreuses allées parcouraient les jardins, et entre ces allées, des parterres de fleurs rassemblant chacun une couleur particulière. Ainsi, Marcius déambulaient entre des parterres de fleurs violettes d'un côté, et roses de l'autre. Les couleurs se déployaient ainsi, en dégradé, formant un arc-en-ciel riche de nuances, pour qui avait la chance de voir les jardins de haut – et, en vérité, seule la famille du duc vivait dans une tourelle suffisamment haute pour avoir la chance d'observer pareil spectacle. D'en bas, l'ensemble était en permanence envahi par un bourdonnent incessant, accompagné de voletements feutrés. Et si seule la famille pouvait voir l'ensemble, il fallait être proche des fleurs pour en sentir le parfum délicat, parfum qui emplissait allégrement des passants. Les pointes du soleil étaient quant à elles composées d'arbres, aux fleurs et aux fruits également colorés. Marcius était encore trop jeune pour prendre la pleine mesure de ce qu'il voyait ; il se contentait de profiter de la myriade de couleurs qui s'offraient à lui. Rolloh, plus averti, se rendait bien compte que ces immenses jardins représentaient énormément de temps, de travail, et d'argent. Assurément, Eliandre était un homme qui aimait les plantes.
Ils suivirent l'une des pointes, bordée de cerisiers fleuris, tandis que Rolloh décrivait le duc Eliandre à son fils. Tout ce que Marcius en retint, c'est que le duc n'était pas méchant et que ses cheveux étaient presque blancs, ce qu'il trouvait amusant. Le reste ne l'intéressait guère – après tout, l'essentiel était qu'il avait engagé son père, alors pourquoi se soucier du reste ? Le printemps commençait à décliner, et leurs pas foulaient régulièrement les fleurs roses qui s'étaient décrochées de leurs branches. Le chemin arboré débouchait sur une grande porte de bois, qui avait une valeur plus symbolique que défensive. Une muraille de bois ceignait pareillement les jardins. Cela aurait pu être considéré comme une forme de négligence, mais les guerres étaient loin, à présent. Continuer d'afficher des protections revenait à injurier ses voisins, aussi les duchés se laissaient-ils guider par les fantaisies de leurs dirigeants.
Tout autour des jardins se trouvait la capitale du duché, Orme. La ville avait été construite de sorte à ce que le château en soit le c½ur battant. Rolloh et sa famille vivaient à la bordure de la capitale, dans une auberge qui s'était spécialisée dans l'hébergement de transit. Les prix étaient bien plus abordables que dans des auberges de passage, et les clients restaient toujours au moins deux semaines. Quelques uns s'étaient même installées là de manière permanente, garantissait à l'auberge une activité stable. Lyanna, la mère de Marcius, était absente. Contrairement à son mari, elle n'avait eu aucun mal à se faire remarquer, et avait rapidement obtenu un emploi de tisseuse. Pour l'instant elle n'était considérée que comme une assistante, mais Rolloh ne doutait pas que son talent naturel lui permettrait de gravir rapidement les échelons. Il réunit toutes leurs affaires dans des paquetages, afin de les déménager dans la cour du Duc. En tant que nouveau maître chien, il avait droit à un logement petit mais confortable pour lui et sa famille, à côté du chenil. Il régla leur frais, laissa un mot pour Lyanna qui lui indiquait le lieu où elle devrait les rejoindre, et quitta l'auberge sans qu'aucune appréhension quant à sa nouvelle vie vienne le troubler. Marcius aurait aimé pouvoir en dire autant, mais s'il était ravi pour son père, sa rencontre du jour avait à la fois exalté et apeuré son c½ur d'enfant.


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#Posté le lundi 19 mars 2018 20:07

Modifié le dimanche 25 mars 2018 12:56

Chapitre Deux.

C'est étrange comme un moment peut faire basculer une vie. Ici, quel avait été ce moment ? Etait-ce la provocation de trop ? Les poings serrés, qui avaient attisé le rire des autres et, proportionnellement, sa colère ? Ou plutôt, ce rire, le sien, qui s'était épanoui dans l'air et avait déclenché cette tempête de fureur ? Marcius tremblait de tous ses membres en regardant le corps étendu à ses pieds. Peu importait ce qui l'avait déclenché, c'était son poing qui s'était écrasé sous la mâchoire du prince. C'était lui le fautif, le seul et unique responsable de ce désastre. Il ferma les yeux un instant, espérant tout effacer, s'effacer lui, pour ne plus voir, ne plus entendre. Mais il entendait. Il y avait ce rire, qui résonnait encore et encore, un rire qui perdait doucement de sa joie pour se perdre dans la nervosité. Des invectives, celles de Benjamin et Lucien, les deux amis de Grégoire qui menaçaient Marcius. Après avoir vu son explosion de force, ils se tenaient à distance respectueuse de l'apprenti forgeron, se contentant de lui promettre mille souffrances, lorsque Grégoire se serait remis. En entendant cela, Marcius eut un bref éclat de rire.

« Vous plaisantez j'espère ? Grégoire ? Revenir ? Vous n'êtes pas sérieux... »

C'est en voyant leurs expressions ahuries qu'il comprit. Ils ne s'étaient pas rendus compte. Malgré le craquement sinistre, personne à part lui n'avait réalisé que Grégoire ne se remettrait jamais. En formulant cette pensée, Marcius sentit la bile lui remonter dans la gorge. Il ne savait pas s'il avait envie de rire de l'incompréhension des nobles, rire pour se libérer de toute la noirceur qui menaçait de le submerger, ou s'il désirait se rouler en boule et pleurer comme un gamin parce qu'il venait de tuer un homme. Ahri fut la première à comprendre le sens des paroles du jeune homme. Elle le regarda avec de grands yeux, mais Marcius était incapable d'identifier ce qu'il lisait dans son regard. Un spasme nerveux secouait ses lèvres roses, fantôme du rire qui l'avait habitée. Après un moment de doute, elle prit la parole, avant que quiconque puisse la lui voler.

« Tu devrais partir. Avant que Grégoire ne revienne à lui. »

Et c'est ce qu'il fit. Il ne comprenait pas pourquoi Ahri n'avait pas choisi de le retenir. Sur un mot d'elle, les deux autres se seraient jetés sur lui, malgré leur peur. Mais elle avait préféré lui donner une occasion de fuir, ce qui perturbait grandement Marcius. Pas suffisamment néanmoins pour l'empêcher de reculer à pas lents, l'horreur de la situation s'imposant à chaque seconde avec un peu plus de force dans son esprit, avant de finalement se mettre à courir. Il laissa tomber le paquet qu'il avait gardé accroché dans son dos – le cadeau pour le Prince ! Quelle ironie – et s'enfuit sans un regard en arrière. Il se dirigea droit vers la maison à côté du chenil, de l'autre côté du château. Il préféra faire le tour plutôt que passer par l'intérieur. Les gens qu'il croisa le regardèrent passer avec une moue désapprobatrice, mais ne firent rien pour le retenir. Il arriva rapidement auprès de son père, qui était en train de dresser un jeune faucon. Celui-ci fronça les sourcils en le voyant arriver ainsi à toute vitesse.

« Eh bien quoi ? Que se passe-t-il ?
– C'est... Grégoire. Il faut qu'on parte, papa, maintenant. Pas le temps de prendre nos affaires. Préviens maman, nous devons fuir.
– Mais voyons Marcius, calme-toi ! Je sais que Grégoire et la bande de singes qui l'accompagnent n'ont jamais été tendres avec toi, mais ce n'est pas une raison de fuir.
– Non, tu ne comprends pas. Je l'ai... Il est mort ! Il faut qu'on parte. 

Le sang de Rolloh se figea. Il avait compris ce que son fils n'avait pas osé lui dire. Pas une seconde, il éprouva de la honte, de la colère ou du dégoût vis-à-vis de son fils. Il plongea son regard dans le sien, plein de force tranquille.

– Qui est au courant ?
– Ahri. Peut-être Gautier et Martin. S'ils ne le sont pas déjà, ils le seront bientôt. Ahri m'a permis de fuir. Il ne faut pas gâcher ça. Sinon, je serais condamné à mort, et je ne pense pas qu'ils se montreraient très cléments envers maman et toi. 

La voix de Marcius se brisa sur ses derniers mots, mais il se reprit très vite. Ne pas flancher, ne pas flancher...

– Très bien. Va récupérer nos affaires, et des vivres. N'oublies pas le sel et le poivre.
– Papa, est-ce que c'est vraiment...
– Fais ce que je t'ordonne. Pendant ce temps là, je vais chercher ta mère et préparer des chevaux. Ne me rejoins pas à l'écurie, attends-moi à la sortie Sud. Va. Maintenant ! »

Marcius n'émit plus aucune objection, inquiet de l'urgence qu'il percevait dans la voix de son père. Il se précipita dans leur logement et rassembla le plus d'affaires qu'il le put. Des vêtements, essentiellement, et toute les réserves de nourriture qu'ils avaient, ainsi que quelques ustensiles. Il vérifia qu'il avait bien pris le sel et le poivre et s'en alla, le c½ur serré. Il choisit de ne pas se diriger vers le Sud en restant dans l'enceinte même du château, et préféra plutôt traverser les jardins en ligne droite, vers l'extérieur. Il contournerait la palissade ensuite, cela lui paraissait plus sûr. Moins il était vu, mieux cela valait. Après un temps qui lui parut interminable, il arriva au point de rendez-vous donné par son père. Sa mère l'y attendait déjà, juchée sur un cheval. Si Rolloh avait été calme en apprenant la nouvelle, dans les yeux de Lyanna brillait une colère brûlante. Marcius se fit tout petit. Il vit qu'un deuxième cheval était là aussi, tout harnaché, et il décida d'y attacher les affaires qu'il avait emmenées, avant de l'enfourcher. Il gardait les yeux baissés, tandis que sa mère gardait les dents serrées.
Au bout de quelques minutes, des bruits de sabots se firent entendre, suivis par des aboiements. Le c½ur de Marcius rata un battement. Déjà ? Alors son heure était faite ? C'était une atroce certitude, que celle de savoir que l'on allait mourir en entraînant sa famille avec soi.
« Abandonne tout de suite cette attitude de vaincu ! Gronda la voix de son père. Ce n'est que moi. J'ai pris le plus de chiens possibles avec moi, en prétextant un entraînement. Je n'ai pris que les plus jeunes, pour éviter qu'on me pose trop de questions. Et toi, comment as-tu fait ?

Il s'adressait à sa femme, surpris sans vouloir l'avouer de la facilité avec laquelle leur fuite s'organisait. Lui qui n'avait jamais été croyant se surprit à remercier un Dieu quelconque du présent qui leur était offert.

– J'ai dit que j'avais des courses urgentes à faire. La voix de Lyanna était tranchante.
– Et pour les chevaux ?
– Je n'allais pas porter les courses sur mon dos.
– Eh bien, on peut dire que les garçons d'écurie sont diablement efficaces.

Rolloh eut un petit rire en constatant la fureur dans laquelle nageait son épouse. Elle n'avait jamais supporté la manière donc les nobles du château se comportaient avec son fils, et en voulait terriblement à Grégoire d'avoir poussé son fils à commettre un meurtre. Elle l'aurait volontiers commis elle-même, et d'autres à sa suite, mais avait appris dès son plus jeune âge à prendre sur elle. Comme elle le regrettait maintenant ! Rolloh préféra, à raison, ne pas s'attarder et laisser le temps à sa femme de gérer sa colère, et se tourna vers son fils.

– Bon, tu as le sel et le poivre ?

Cette fois, il s'adressait à Marcius.

– Euh, oui, un instant. 

Après avoir farfouillé un instant dans ses sacs, Marcius sortit les objets demandés. Il regarda son père prendre le poivre et en verser précautionneusement sur le chemin. Il répéta l'opération à divers endroits. Puis, il tendit le sel à son fils et lui demanda d'en verser à son tour sur le chemin.

– Pourquoi devrais-je faire ça ?

Il ne pouvait s'empêcher d'être curieux. Rolloh soupira, navré de voir son fils si ignorant lorsqu'il était question du monde spirituel.

– J'ai mis le poivre pour brouiller la piste des chiens. Toi, tu dois mettre le sel pour éviter que Grégoire ne te retrouve. C'est ton fantôme, pas le mien, donc c'est à toi de t'en protéger. »

Marcius le fixa un instant, sans trop savoir s'il fallait rire ou non. Vu le regard agacé que lui lança son père, associé au soupir pressé de sa mère, il conclut que non. En grognant, il fit attention à bien verser le sel sur le chemin derrière lui, bloquant ainsi le passage à l'improbable fantôme de Grégoire. A quoi cela servait-il de brouiller l'odorat des chiens si c'était pour laisser des preuves aussi évidentes de leur passage ? A coup sûr, ce serait la superstition de son père qui les tuerait. Après ça, il talonna son cheval, considérant qu'ils avaient perdu déjà suffisamment de temps. Il se mit d'abord au trot, laissant le temps à ses parents de se mettre à sa hauteur. Dans un murmure, son père lui indiqua la direction à prendre.

« Nous allons vers la Forêt. »

***

L'Empire namorien, dont la Nusitie faisait partie, n'avait pas de voisins. Ses seules frontières étaient celles imposées par la nature. Au nord et à l'ouest, un immense océan. À l'est, des montagnes rocheuses impossibles à franchir. Et au sud... La forêt. Elle était inquantifiable. Des hommes de l'Empireavait tenté d'en définir les limites ; ils avaient chevauché des jours durant sans atteindre son c½ur. Alors ils étaient rentrés, et l'empereur avait décidé que la forêt ne devait pas être franchie. Par ailleurs, très peu d'hommes avaient envie de s'y aventurer. Ils coupaient du bois, à l'orée de la forêt, quand le besoin s'en faisait sentir, mais n'osaient jamais aller plus loin. Il faut dire qu'un monstre naturel de cette taille a de quoi effrayer même les plus braves ; et les terreurs les plus profondes prennent toujours naissance au creux des racines, sous les frondaisons épaisses des arbres, là où la lumière ne filtre pas.
Cette forêt tentaculaire, Marcius l'avait longée une fois. Sa famille quittait Rolends, où Marcius était né. C'était la capitale de l'Empire, la ville qui était le point de jonction des trois royaumes, et accessoirement la seule ville portuaire de Nusitie. Rolloh y gérait les élevages secondaires du Duc Herbert ; celui-ci tenait à avoir chiens et faucons de chasse personnels à disposition chaque fois qu'il rendait visite à l'Empereur. Mais Herbert se faisait vieux, et il avait de toute manière toujours préféré la boisson et les plaisirs de la chair aux parties de chasse. Aussi, un an avant leur arrivée en Ailite, Rolloh fut remercié. Herbert s'était proposé de l'engager à sa propre cour, mais Rolloh avait décliné, refusant que Marcius grandisse dans un environnement aussi débridé – la famille d'Herbert étant nombreuse, et réputée pour ses m½urs légères. Il choisit donc Ailite, mais profita de l'occasion pour voir un peu du pays. En réalité, sa relation avec Lyanna s'était énormément dégradée ces dernières années, et il espérait que voyager en famille leur permettrait de repartir sur de bonnes bases. Ainsi, lors de sa sixième année, Marcius fut propulsé hors de son univers familier pour partir à la conquête de l'inconnu. D'abord, ils longèrent toute la côte sud, quittant par-là la Nusitie pour vagabonder dans le royaume de Kardelic. Rolloh apprécia particulièrement cette partie de leur voyage, lui qui avait toujours aimé la mer et sa sauvagerie. La deuxième partie de leur traversée se déroula à la lisière de la forêt. Marcius n'en gardait pas grand souvenir ; il revoyait vaguement son père s'éclipser avec les habitants du coin, discuter à voix basse, tandis que sa mère le regardait d'un air à la fois navré et attendri. Régulièrement, Rolloh se révélait à la forêt pour lui présenter ses respects et lui demander d'éloigner les monstres de sa famille. Il ne savait pas, alors, que contrairement à ce que l'on croyait, la peur ne se dissimulait pas sous le couvert des arbres, mais bien dans le c½ur des hommes. Il était fermement convaincu que les plus grands monstres étaient ceux que l'on ne voyait pas, et cette croyance était trop fermement ancrée en lui pour qu'il puisse un jour s'en détacher tout à fait. Mais son fils avait vu la forêt, avait vu les ombres mouvantes, et il avait vu les hommes. Il savait qui des deux était le plus à craindre.
Si Marcius n'avait que d'épars souvenirs de son voyage, il se souvenait avec netteté du sentiment de plénitude qui s'épanouissait en lui lorsqu'il se mêlait aux arbres. Il trouvait leur présence rassurante. Et au fond lui brillait une flamme curieuse, qui ne désirait que partir à la découverte de ces terres inconnues. Mais il était trop jeune, encore. Intrépide, à n'en pas douter, mais incapable pour autant de se séparer de ses parents. Il se promit néanmoins une chose ; à défaut de pouvoir s'en aller dans la forêt, il travaillerait au contact de la nature. Il ferait son apprentissage auprès des jardiniers du duché, il ferait pousser des arbres ; peu importait qu'il ne soit pas considéré par les autres, il savait déjà qu'il n'aurait que faire des honneurs – comme son père. Il désirait simplement recréer cette magie naturelle qui l'avait bercé et enchanté durant son voyage, où qu'il aille. Et quand il apprit le nom de la ville où son père espérait s'installer, Orme, il lui sembla que l'avenir lui souriait. Il s'agissait forcément d'un signe.
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#Posté le mercredi 04 avril 2018 16:26

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